Les terres hostiles

[Ermite des vagues]

Sans prendre la peine de regarder le moine, Iorek lui répondit :

-Il y a un passage entre les montagnes, un défilé étroit, mais même avec les elks et les traineaux, nous pourrons passer.

S'il a encore bougonner sa réponse, il n'a pas réussi à dissimuler son inquiétude. A fur et à mesure qu'ils approchaient des montagnes, Iorek les fixait sans discontinuer, et sa main droite frôlait souvent son long poignard en os.

La journée se révéla plutôt tendue, et les deux hommes arrivèrent à proximité des montagnes alors que le jour commençait à tomber. La neige recommençait à tomber, tout comme le froid plus piquant. Il lança un nouveau regard vers les montagnes, et fit signe au moine de se stopper.

-On va emprunter le défilé tout de suite. Ne fais pas un bruit.

D'ordinaire, il préférait pourtant attendre le jour pour passer par là, surtout après une longue journée dans le froid. Mais là, il préférait continuer. Et l'elk de Iorek reprit sa marche, lentement. Le passage entre les montagnes était devant eux, étroit et sombre. Des rafales de vent leur envoyaient de la neige. Les deux pans de montagnes qui les entouraient étaient escarpés, et la roche couverte de glace et de neige par endroit était coupante.

[Aguétiel]

*Cette journée est particulièrement éprouvante pour le moine, avec la neige qui tombe et le froid qui devient de plus en plus piquant. Bientôt, il remarque avec horreur que la fourrure de son manteau est gelée par endroits.

C'est exténué qu'il atteint la montagne avec Iorek. Cependant, il n'entend pas les avertissements du vieux cartographe, tant son esprit est loin.

Et, finalement, quand ils commencent à traverser le défilé, il craque. La fatigue, l'épuisement on gagné.

Lentement, il glisse de la selle de son elk, et, comme une marionnette désarticulée, il tombe à bas de l'animal.

Paf.*

[Ermite des vagues]

Le bruit du corps du moine tombant au sol résonna étrangement entre les parois de la montagne. Aussitôt, Iorek s'était retourné, le visage grave. Il ne poussa aucun juron ni exclamation, son regard allant du corps du moine inconscient, à la montagne. Il aurait pu décider de fuir et laisser là le moine, et pas parce qu'il craignait ces montagnes depuis quelque temps. Seulement, il ne voulait pas encore se coltiner un fardeau, le lémure et cet immense béta lui avaient suffit. Mais Toruuk Hakan ne lui pardonnerait pas un tel geste. Iorek continua de fixer la montagne. L'espace d'un instant, il crut percevoir un mouvement. Mais finalement, ce n'était qu'un aigle des neiges.

Il n'y avait plus aucun bruit maintenant, à part un silence oppressant. Le cartographe mit pied à terre et donna une légère tape sur le flan de Brââm. L'elk continua sa progression, seul, vers la sortie du défilé. Iorek avait agi par instinct, et son instinct avait vu juste. Parce qu'à l'endroit même où l'elk se tenait quelques instants plus tôt, un gros amas de neige et de glace tomba. Une avalanche ?

Apparemment oui. Ça tremblait et il vit une masse de neige descendre les pans de la montagne. Iorek fila vers le moine aussi vite qu'il le pouvait et sans ménagement, il le déposa sur le traîneau, puis monta sur l'elk. L'animal était déjà effrayé, si bien que Iorek n'eut aucun mal à le faire quitter cet endroit. Ils n'étaient plus très loin de la sortie, mais l'avalanche était presque sur eux. Et dans sa précipitation, l'elk buta contre un rocher couvert de neige, faisant tout valser. Iorek se retrouva tête la première dans la neige et Yukan sous le traîneau.

Puis, tout devint blanc autour d'eux.

*******************************************

Le choc brutal réveilla le moine, qui en ouvrant les yeux, vit qu'il était coincé sous le traîneau, mais en un seul morceau. Et la neige l'avait enseveli.

[Aguétiel]

*Yukan se réveille, tiré de son inconscience par un choc et un bruit de fin du monde. Il fait noir. Et il fait froid.*

-Iorek ?

Que s'est-il passé ?

*Il tend les mains en avant et découvre bientôt qu'il est dans une sorte de cellule. Il est coincé sous un tas de neige, le traineau au-dessus de lui.

Il est exténué. Mais s'il veut s'en sortir, il va devoir utiliser sa maîtrise.*

-Bon...

*Il concentre de l'air dans ses mains et fait dégager le tas de neige d'au-dessus de lui. La lumière du jour revient.*

-Iorek ? Où es-tu ?

*Crie-t-il en regardant autour de lui.*

[Ermite des vagues]

Yukan a beau crier, le cartographe ne lui répondit pas. Par contre, le moine aperçoit à quelques mètres de lui quelque chose ressemblant fortement à une botte. Et un peu plus loin, Brââm, l'elk de Iorek, sain et sauf.

[Aguétiel]

-Iorek ?

Merde.

*Yukan court vers la botte et tente de déterrer la jambe qui se cache éventuellement en-dessus. Au point où il en est, il n'y a plus que l'adrénaline qui le fait avancer.*

[Ermite des vagues]

Le moine tira donc sur la botte. Sauf que la botte quitta son propriétaire à force de tirer, et là, Yukan, après être tombé sur ses fesses, put entendre des bruits. Une voix étouffée par la neige. Iorek était bien là, et plus sonné du tout, essayait de se sortir du tas de neige tout seul. Et il y parvint, aussi incroyable que cela puisse paraître, vu la quantité de neige au dessus de lui. Et tel un yéti, il sortit en bougonnant, et en tenant quelque chose dans la main. Il posa son regard sur le moine, puis un autre vers son elk, Brââm.

-j'pensais que c'était Brâam qui tirait sur ma botte. Et que ça, et il montra alors un morceau de bras congelé, et à moitié rongé par les loups, c'était ton bras !, fit-il, s'adressant au moine.

Il lança le bras au loin.

-Ne restons pas là en tout cas !

Il regarda la montagne d'un air mauvais. Puis jaugea le moine. Alors que lui même n'était pas en pleine forme non plus.

-Capable de marcher un peu au moins ? Ou de monter Brââm ?

Iorek s'inquiéterait-il pour Yukan ? Mais une chose était sûre, il n'avait pas la moindre envie de s'éterniser là. Même s'ils avaient perdu un elk et une partie de leur matériel.

[Aguétiel]

*Yukan tire donc sur la botte pour tenter de dégager son propriétaire. La botte vient la première cependant, et Yukan tombe en arrière la tête la première.
Un son étouffé provient du tas de neige, qui se met bientôt à remuer comme si une créature énorme tentait de se frayer un chemin hors de celui-ci. Iorek en émerge, ce qui est surprenant étant donné la masse de neige qui reposait sur lui.*

Cet homme est une force de la nature !

*Il descend du tas de neige en bougonnant avant de découvrir Yukan. Il tient quelque chose en main qu'il tend vers le Nomade.*

-J'pensais que c'était Brâam qui tirait sur ma botte. Et que ça, et il montre alors un morceau de bras congelé, et à moitié rongé par les loups, c'était ton bras !

*Yukan est quelque peu surpris par la découverte de Iorek et tâte spontanément ses bras comme pour vérifier que ceux-ci sont toujours là.

Iorek lance le bras au loin en voyant que le fils de l'air est au final sain et sauf.*

-Ne restons pas là en tout cas !

*Il jette à la montagne un regard mauvais avant de revenir vers le moine.*

-Capable de marcher un peu au moins ? Ou de monter Brââm ?

*Le Nomade se relève en s'aidant de sa maîtrise.*

-Je peux marcher, oui... Mais ce ne sera sans doute pas longtemps.

Je suis si fatigué... Je sais pas combien de temps je vais pouvoir tenir sans complètement lâcher...

[Aguétiel]

EDIT YUYU: Et merde, voilà que je viens encore d'éditer le post de l'Ermite des Vagues. Du coup, je l'ai changé en Yukan... Heureusement, rien ne change en substance par rapport à ce que tu avais écrit.

*Iorek lance un regard explicite au Nomade. Il soupire également, de lassitude.*

-Installes-toi dans le traîneau

*La ton de la voix du vieux cartographe ne laisse aucune place à la discussion. Et de toute façon, Yukan est bien trop fatigué pour commencer à argumenter avec Iorek. Pour l'instant, il s'agit de s'éloigner de la zone.*

-Juste... Je dois récupérer deux choses !

*Il ramasse donc son baton-planeur et lesac contenant de quoi récolter ses informations sur le Pôle avant de littéralement s'effondrer à l'arrière du traîneau. Ce n'est pas très confortable, et le Moine doit repousser quelques affaires pour pouvoir s'installer et se couvrir d'une peau qui a le mérite de bien lui tenir chaud.*

C'est bien plus rude que tout ce que j'avais pu imaginer...

*Derrière lui, Yukan entend Iorek fouiller dans une sacoche.*

-Je crois que tu en as bien besoin aussi.

*Et il lui lance ce qui semble être une gourde. Yukan la débouche et immédiatement une puissante odeur d'alcool parfume l'air.*

-Arf...

*Il n'a pas l'habitude de l'alcool, mais il a lu que ça aidait les aventuriers du froid en ces situations délicates. Il porte le goulot à sa bouche et boit un peu plus avidement que ce à quoi à s'attendait. Il toussote et crache un peu. Mais la chaleur dans son œsophage lui fait un bien fou. Les effets ne tardent pas. Il se sent euphorique et il ne voit pas les heures passer jusqu'à ce que Iorek les mène finalement à un abri: une grotte suffisamment éloignée des montages au goût du vieux cartographe.

Le repas fut sommaire, mais au moins, ils passèrent la nuit à l'abri. Ils avaient perdu la tente, et des vivres, ainsi que les ustensiles de cuisines et du matériel divers et variés.*

-Il se trame vraiment quelque chose d'étrange dans les montagnes. Cette avalanche, ça n'était pas normal..

*Yukan tente bien d'en savoir plus, mais la fatigue les emporta bien vite tous les deux. Et puis, ils sont désormais suffisamment éloignés de la montagne, non ?

Les deux jours suivants furent aussi difficiles, et le terrain se faisait accidenté, et le temps de plus en plus médiocre. Et Iorek se murait dans le silence. Il était pensif.

Finalement, le matin du troisième jour, il déclare au jeune moine :*

-On y est presque.

*Il désigne une crête montagneuse, et il a presque un sourire aux lèvres. Presque. C'est Iorek, quand même.*

-Peu de gens connaissent cet endroit..., *fait-il énigmatique.*

*Quelques heures plus tard, ils gravissent une crête, et là, Yukan découvre un paysage qui le laisse sans voix. Nichée derrière la crête, se trouvait une forêt. Une très ancienne forêt. *

-C'est... C'est bien ce que je pense que c'est ? C'est... Le Pôle Nord ?

*Il n'aurait jamais espéré le contempler lui-même. C'est maintenant chose faite.
Il serre son baton-planeur plus fort. L'envie de prendre la hauteur pour comprendre le lieu se fait forte en lui.*

[Ermite des vagues]

Un rictus amusé apparut sur le visage buriné par les éléments du cartographe. Un sourire de sa part, c'était exceptionnel, mais les réactions des rares personnes à être venues ici avaient toujours eu tendance à l'amuser. Lui n'était guère impressionné, même si selon Ineka, la grande prêtresse, des esprits résideraient dans ce lieu. Pour Iorek c'était donc une forêt presque ordinaire, même s'il se refusait à chasser la moindre bestiole y vivant.

-Et que penses-tu que ce soit ?

Iorek était en train de se demander si le Nomade voyait ce que lui n'arrivait pas à voir, c'est à dire la spiritualité qui émanait de cette très ancienne forêt.

-N'oublies pas qu'on n'est pas tapé tout ce trajet juste pour faire du tourisme. Il faut trouver ces satanés fleurs.

Et donc, Iorek s'apprêtait à descendre, jusqu'à la forêt aux arbres millénaires.