Ba Sing Se

[Spoon]

Alors que Nivi finit son monologue, elle se rend compte de la stupidité de sa réaction. Elle qui a toujours été renfermée la voilà à se délivrer au premier inconnu. Peut-être qu'elle a finalement fait son deuil et qu'elle se sent prête à communiquer de nouveau. Quoiqu'il en soit, en se retournant vers Jinnai, il semble que ce dernier en avait rien à foutre. Qu'importe, parler lui a permis de retrouver le calme avec elle-même. Une étrange odeur vient cependant lui titiller les narines.

/ Ca sent le brûlé. /

Après un rapide coup d'œil alentours, rien ne semble avoir pris feu. Peut-être un bâtiment proche, mais de la fumée serait visible et ce serait la cohue. Juste une impression.

Calmement, Nivi se lève en direction des journaux archivés, laissant l'esprit dans sa méditation. Pendant qu'elle fouille dans les papiers, Nivi repense à ce qu'il vient de se passer il y a quelques minutes. Une réaction très atypique que de se confesser de la sorte, ça ne lui ressemble pas. Elle se racle la gorge pour symboliser la reprise de contrôle sur soi. Il ne lui faut pas beaucoup de temps pour ramener à sa table ce qui l'intéresse, le classement chronologique ayant beaucoup aidé. Maintenant il lui faut trier les journaux.

- Tiens ? Vous êtes toujours là, vous ? Je vais finir par croire que vous trouvez ma compagnie agréable.

Arrivée à sa table, elle sort un journal de sa pile qu'elle place en direction de Jinnai, avec en couverture une illustration du masque de l'iniquité. Le gros titre parle d'une maîtrise du métal déshonorée (je l'aurais calé \o/). Vu le bordel qu'il avait causé, son identité masquée était connue de partout dans le Royaume. De plus, vu le penchant de Nivi pour le métal, l'énergumène était loin de lui être inconnu, même si elle ne souhaite pas spécialement le rencontrer en personne.

- C'est pas l'homme dont vous parliez ? Vous avez de drôles de fréquentations.

Avant que l'éther ne réponde, elle replonge dans ses recherches à la lueur de l'aura, toujours présente. Quelque chose la met toutefois mal à l'aise. Pas de bruit, ni d'agitation, ni de psychose. Toujours quelques râles au loin. Maintenant qu'elle y repense, elle n'a pas croisé beaucoup de monde dans les rues. Toute la population n'a pourtant pas pu être évacué. Qu'importe, pour le moment elle se concentre seulement sur ses recherches. Etrangement, il manque tous les journaux des différentes éditions aux mêmes dates. Quant au reste, aucun gros titre ne parle d'une guerre civile comme l'a souligné Jinnai.

Un évènement de cette ampleur n'a pas pu passer inaperçu, d'autant plus que le sujet a été abordé durant ses études même s'il n'est pas si approfondi que ça. Les archives datent de deux décennies aussi, ce n'est peut-être pas tant une coïncidence que ça. Puisque Nivi se trouve dans le rayon Histoire, des livres sur le sujet doivent s'y trouver. En effet, ce n'est pas ce qu'il manque. Elle les consulte rapidement, passant sur les détails de la période en elle-même, seules les répercutions l'intéresse. Nivi est tellement plongée dans ses recherches qu'elle ne pense même plus à Jinnai. Depuis le temps il a sûrement dû partir. Il y a eu des morts, c'est un fait. Des exécutions ont eu lieu aussi, mais rien qui ne mentionne que c'eut été des nobles.

Tout devient confus, les informations collectées se contredisent toutes. Nivi ne sait plus ce qu'elle doit comprendre. Les réponses à ses questions se trouvent sûrement au Palais.

- Je dois aller au Palais Roy…

Nivi vient de se rendre compte qu'elle a exprimé sa pensée à voix haute, la mettant dans une situation assez délicate si l'esprit l'a entendu.

[Jinnai]

Jinnai est toujours là, mais il ne semble pas porter plus d'attention à Nivi que ça... il se contente de lâcher une pique :

Vous saluerez les agents du Daï Li et la garde royale de ma part, je suis certain qu'ils vous réserveront un accueil très chaleureux.

[Spoon]

Nivi ne relève même pas la pique, sachant très qu'elle ne va pas entrer comme ça, même en montrant ses seins. Quoique. Ca marcherait sûrement. BREF. Avant de quitter la bibliothèque il vaut quand même mieux ranger le bordel et éviter de laisser traîner ce genre de recherches. Elle reprend sa paperasse, déchire quelques pages et remet le tout à sa place rapidement. Elle et le rangement, puis pas que ça à foutre non plus.

La jeune femme ne se soucie même plus de savoir si Jinnai est encore là, de toute façon elle ne lui est qu'une distraction. C'est quand même flippant de savoir que quelqu'un la regarde en permanence. Une rencontre bizarre soit dite en passant. Nivi passe devant la porte principale alors qu'elle se dirige vers le même chemin pour sortir du bâtiment. Rien ne la bloque, la bibliothèque était-elle déjà fermée lors du séisme ou le responsable a pris le temps de fermer la porte pendant la panique ? Elle baisse la poignée et pousse la porte qui s'ouvre sans difficulté.

/ Tirer. Il fallait tirer cette putain de porte. /

Elle fait léviter un morceau de pavé de la route et vient s'y éclater la tête dessus en guise de facepalm, avant de refermer la porte.

Si elle souvient bien de la vue quand elle était sur le toit, Nivi a repéré où doit se trouver le Palais Royal mais encore faut-il y aller, sans vision pour se guider ça va être plus compliqué. Elle se met donc en route. A marcher. Pendant de longues minutes. Avant de réaliser un truc.

/ Et merde, je me suis perdue. Rhâ je déteste cette ville. /

[Conteur de la Terre]

Ouaip, t'es vraiment paumée : va falloir faire quelque chose pour te repérer parce que les rues sont complètement désertes et le poltergeist ne semble pas dans les parages.

[Spoon]

HRP : Je suis parti du principe que " le poltergeist ne semble pas être bien loin dans les parages".



Nivi réfléchit. Elle a dû marcher entre un et deux kilomètres à tout casser. Quitter l'axe principal a sûrement été son erreur. Le problème des villes, ce que l'on est obligé de suivre les rues. Elle rebrousse chemin, se souvenant au moins du chemin qu'elle a emprunté. Prendre une carte dans la bibliothèque n'aurait pas été con. Cependant, dans un coin de rue elle ressent une présence, du moins, dans sa tête.

Elle s'arrête. Juste une impression. Plus loin, même sensation.

Un bloc de pierre traverse la rue de part en part avant de s'écraser sur une habitation. C'était un réflexe de Nivi, qui l'avait propulsé en se retournant, mais l'attaque n'a rien donné, la rue est déserte. Elle reprend sa marche vers la grande rue, cette fois sans activité bizarre.

Arrivée de nouveau sur l'axe principal, elle se situe déjà mieux dans l'espace. Il lui reste deux solutions. Remonter jusqu'à la bibliothèque ou trouver son chemin. C'est alors que ses anciennes visions lui reviennent à l'esprit, la rendant vraiment confuse sur leur signification. Chaque chose en son temps, pour le moment elle doit se rendre au Palais. La jeune femme lève la tête, observant les toitures pendant un moment, se concentrant. Dans une pulsion soudaine, Nivi se catapulte sur le toit le plus proche, grâce à une impulsion au sol. Ce n'est pas la première fois qu'elle utilise cette technique. Dans les montagnes c'était un des ses coups récurrents pour atteindre rapidement les hauteurs. Ce mouvement la surprendra toujours, elle qui n'arrive à déplacer de gros blocs qu'occasionnellement, elle est capable de ce coup sans trop de difficultés.

Les immeubles ne sont pas bien élevés, mais ils offrent un panorama suffisant pour repérer l'immense architecture du Palais. Elle peut s'y rendre par les toits, mais la structure de ces derniers rend impossible l'utilisation de l'impulsion. Qu'importe, Nivi a eu assez d'acrobaties pour aujourd'hui et maintenant qu'elle a visualisé une artère qui menait directement à sa destination, elle irait par le bas.

Après être descendue en manquant de se vautrer, Nivi s'enfonce dans la rue d'un pas accéléré, toujours dans une ville qui semble déserte, hormis cette présence. Plus la jeune femme s'approche du Palais, plus les cris se rapprochent, ce qui la rassure quelque peu.

Toujours cette sensation d'une présence.

C'est d'ailleurs quand la rue se termine pour rejoindre l'avenue qui longe les fortifications du Palais, que Nivi aperçoit un immense attroupement de citoyens, protestant contre l'une des portes d'accès de l'enceinte royale. Voilà donc où se trouve la population, qu'une poignée de gardes tentent tant bien que mal de contenir.

Elle se rapproche.

Nivi s'accote contre le mur de l'habitation faisant l'angle du carrefour. Elle se demande comment elle va pouvoir entrer dans le Palais avec tous ces gardes en alerte, même si pour eux une intrusion devrait être la dernière des possibilités dans l'état actuel.

Derrière.

[Conteur de la Terre]

Tu fais donc le tour du patté de maison... le palais est entouré d'une immense muraille avec une sentinelle postée sur une tourelle tous les 50 mètres... il est également quadrillé par une zone aplanie de sécurité d'une centaine de mètres de large, sans aucun bâtiment pour masquer ton approche : c'est une véritable forteresse à l'intérieur de la ville.

[Spoon]

Décidément, soit les esprits jouent avec Nivi soit les visions lui donnent des hallucinations. Après s'être secoué la tête elle s'avance dans la rue qui longe les murs du Palais, en direction opposée de la foule dans un premier temps. Les murs sont immenses et extrêmement renforcés avec en plus des postes de sentinelles à intervalles régulières. Inutile de faire tout le tour, toute l'enceinte royale est aux aguets.

Il faudrait une diversion et encore, pas sûr que ça fonctionne. Les troupes sont plutôt nombreuses et rien pour se cacher : aucun bâtiment, aucune pénombre. Pourtant, la foule semble être relativement importante, une émeute de cette envergure pourrait causer suffisamment de bordel pour occuper une bonne partie des gardes.

Maintenant il faut s'infiltrer dans la foule en panique. Nivi prend une grande inspiration avant d'emboîter le pas en direction de celle-ci. Plus elle se rapproche, plus son cœur se met à battre rapidement, le stress la gagne progressivement. Mauvaise idée, c'est définitivement une mauvaise idée. Mais elle n'a pas le choix. Au fur et à mesure qu'elle s'avance, les cris deviennent plus discernables.

# Les esprits sont en colère ! #

# Laissez-moi rentrer ! Je ne veux pas mourir ! #

# Où est ma fille ? #

# On va tous crever, on va tous crever, la fin du monde nous attend et nous on fait la fête tout l'temps ! #

Environ une centaine de personnes sont agglutinés face à la grande porte qui n'est en fait qu'une simple grille. Ce n'est sûrement pas la première porte avant d'atteindre réellement l'enceinte royale. Une poignée de gardes tente de les raisonner, que le Palais n'ouvrira pas ses portes et qu'eux non plus ne savent pas ce qu'il se passe. Nivi se mêle à la foule à contrecoeur, réajustant régulièrement ses vêtements par stress.

Quand un individu l'agrippe soudainement par le col :

# Le sang deviendra impur ! Le corps accueillera toutes les putréfactions de la terre ! Les visages seront rongés, les membres décharnés ! #

Nivi en reste pétrifiée. Ce prophète avait la chance de se trouver au milieu d'une cohue sinon il aurait été amputé de ses deux bras. Heureusement pour elle, le fou disparaît vite. Le temps de se remettre de ses esprits, quelques cailloux commencent à voler en direction des gardes, qui se montrent de plus en plus sur la défensive. C'est peut-être l'opportunité dont a besoin Nivi. Tout ce que Nivi espère dans le moment, c'est ce que ça parte en émeute. Mais la situation l'empêche de se concentrer, ses mains tremblent, sa respiration est forte. Pas du tout à l'aise, elle s'énerve. La colère lui permet tout de même de détacher un bloc qui part en direction de l'entrée. L'émotion rend sa maîtrise très aléatoire, le projectile ne reste pas solide bien longtemps et finit par se disloquer en plusieurs morceaux qui finissent leurs courses sur un garde visiblement remonté.

[Conteur de la Terre]

Bien évidemment, le garde ne met pas longtemps à réagir, et entraine par effet de ricochet ses collègues.

Le ton monte, de plus en plus de personnes rejoignent le mouvement... si ça continue comme ça il y aura une émeute.

C'est alors que tu sens une drôle d'odeur... avant que tu n’aies le temps de réagir tu réalises que les manifestants autour de toi tombent un à un comme des mouches.

Finalement, tandis que tu te retrouves toi même face contre terre et que tu es sur le point de perdre conscience, tu entends la voix d'une femme.

Manifestants neutralisés : nettoyez moi tout ça.

Tu te réveilles dans une chambre d'hôtel, sans même que tu ais ne serais-ce le souvenir de quand où comment tu es arrivée là. Au dehors, le soleil commence à poindre le bout son nez, et le pilier de lumière a depuis longtemps disparu.

[Jinnai]

Je vous avais prévenue.

Lance un Jinnai visiblement très amusé par la situation.

[Spoon]

La lueur du jour pointe timidement le bout de son nez à travers la fenêtre d'un hôtel plutôt honorable. Les rayons du Soleil viennent se poser en fourbe, tel un sniper, droit dans les yeux de Nivi. La bouche pâteuse, elle se réveille en clignant des yeux et s'étirant légèrement avant de réaliser que… son visage est à découvert.

Elle pousse un cri.

# Je vous avais prévenue. #

Nivi se rend compte également que Jinnai se tient dans un coin de la pièce, à gratouiller sa barbe.

Elle pousse encore un cri.

La jeune femme s'aperçoit également qu'elle est aussi habillée avec une sorte de nuisette, plutôt légère et moulante, ses habits se trouvant sur la commode à côté de l'esprit qui semble apprécier la vue.

De nouveau un cri. Plus long.

# Tu vas jouir en silence, oui ?! #

Les murs ne semblent pas être épais. Aussi, un long silence envahit la pièce pendant que Nivi se bat avec sa couverture pour tenter de recouvrir un maximum son corps le plus rapidement possible. La lumière de l'aube révèle petit à petit son visage. La couleur de sa peau est légèrement pâle causée par son "masque". Sa chevelure longue et brune se laisse tomber jusqu'à mi-hauteur du dos, contrairement à ce que pouvait laisser croire son accoutrement. Ses yeux affichent une couleur ambrée légèrement foncée, offrant un contraste avec son teint plus pâle. Le reste des traits de son visage affichent des rondeurs séduisantes, l'absence de maquillage et une légère cicatrice peu visible à hauteur de l'œil. Nivi se tourne vers la fenêtre, admirant la lumière du jour.

- J'ai dormi pendant combien de temps ?

Elle n'a pas encore relevé la remarque de Jinnai. Tout ce dont elle se souvient c'est une amorce d'émeute et qu'elle a perdu connaissance après une odeur nauséabonde. C'est sans doute ce qui a provoqué cet état de léthargie. Serait-ce Jinnai ? Nivi rigole rien qu'à cette pensée et en plus elle se souvient d'une voix féminine juste avant. Et d'ailleurs…

/ Qu'est-ce que je fous habillée comme ça ? /

En fait, elle préfèrerait ne pas savoir. Il est certain que l'esprit a choisi de se positionner à cet endroit pas par hasard. La tête dans le cul, Nivi se lève et va fatalement rejoindre la commode où sont disposés ses vêtements, toujours avec la couverture autour de sa taille. Après les avoir récupérés elle se change directement sous le regard de Jinnai, non l'en lui déplaise, contrairement à Nivi qui affiche un regard blasé. Qui que soit qui l'ait amené ici aurait au moins pu prendre l'option avec salle de bain individuelle.

Alors qu'elle réajuste son bracelet, elle décide de ne pas recouvrir son visage pour le moment. Cependant, elle se rend compte en époussetant ses habits qu'elle a été délestée de toutes ses poches. Elle tourne la tête vers Jinnai qui la toise de haut en bas en triturant sa barbe, le sourire en coin.

- J'imagine que je peux me les mettre où je pense.

Nivi a très bien compris qu'elle ne retrouvera pas ses affaires. Ses recherches sur ses ancêtres, son passé, les notes de sa mère, plus rien. Elle traverse la pièce avant d'ouvrir la fenêtre, puis se penche en avant pour s'accouder au rebord. Elle ferme les yeux un moment, profitant de la chaleur de l'étoile sur son visage. Puis elle contemple la vue, qui donne sur une artère de la ville qui commence à prendre vie, comme s'il n'y avait jamais eu de lueur blanche ni de séisme. Nivi se trouve sûrement dans un coin de Ba Sing Se qui n'a pas été touché. Quoiqu'il en soit elle se dit qu'elle a dû rester inconsciente au moins plusieurs jours. Et son ventre le lui fait savoir.

Voilà plusieurs mois qu'elle était revenue à Omashu cambrioler sa maison d'enfance dans l'espoir de récupérer quelques vieilles affaires. C'était d'ailleurs à partir qu'elle a commencé ses recherches, après avoir trouvé les fameux documents qui l'ont mené jusqu'ici. Ce n'était pas la cause de sa vie mais au moins elle avait trouvé de quoi s'occuper. Voilà qu'elle se retrouve de nouveau sans rien, tenter de continuer à chercher les traces de sa dynastie maternelle lui apporterait trop d'ennuis. Et maintenant ? Nivi se demande si elle ne va retourner à errer dans les montagnes du Royaume, retourner à Republic City et s'enliser dans une routine morne et monotone ou pourquoi pas rester à Ba Sing Se bien qu'elle déteste déjà cette ville. Ne sachant même pas si Jinnai est encore présent, quoique vu la position de la jeune femme qui met en valeur sa croupe, il doit toujours être là. Elle se permet tout de même de faire une remarque à voix haute.

- Moi qui croyais que vous vouliez du spectacle, vous auriez pu me laisser entrer au Palais vous auriez été servis. Dites, vous ne maîtriseriez pas la Terre par hasard ?

Même si elle s'attend à un rire narquois en guise de réponse, Nivi se rend compte que Jinnai a été d'une compagnie plus longue que tous les contacts réunis qu'elle ait pu avoir ces derniers temps. Il faut dire aussi que ce n'est pas vraiment un être humain. Pourtant il n'a plus aucune raison d'être encore présent si tout est rentré dans l'ordre. De plus, il n'y a plus d'action pour le divertir si on exclue son cul. Elle se retourne en se redressant, puis s'accote les bras croisés contre le cadre de la fenêtre, tout en dévisageant l'esprit.