Je ne pense pas être assez prétentieux pour ressentir le besoin de raconter ma vie à tous et à toutes, le besoin de laisser une trace indélébile dans le temps et dans les mémoires... A quoi cela peut-il bien servir ? Si ceux qui nous aiment se souviennent de nous, de quoi peut-on bien avoir besoin de plus ?
J’en vois déjà certains froncer les sourcils, me demander pourquoi, dans ce cas, je pose ces lignes sur le papier, pourquoi je perds mon temps dans une entreprise que je juge apparemment vaine et stupide... Et bien, à ces personnes, je leur dirais qu’elles peuvent passer leur chemin, je ne les retiens pas. Ce n’est pas pour elles que je fais tout ça, et qu’elles le lisent ou non ne me fait ni chaud ni froid.
Non, c’est pour elle que je le veux le faire... Tout ce que je suis, tout ce que j’ai, c’est à elle que je veux le donner.... Elle qui m’a ouvert les yeux sur le monde, qui m’a appris à voler de mes propres ailes.... Elle, qui m’a appris à aimer...
Mais je parle, je parle, et mon récit n’avance pas d’un pouce... Car même si je pourrais vous parler d’elle pendant des heures, de sa voix, de son sourire.... Ce n’est pas pour ça que j’ai pris la plume... du moins, pas encore...
Il paraîtrait que nos souvenirs remontent jusqu’à nos premières années, très tôt dans notre vie... Je ne sais pas pour les autres, mais il m’arrive parfois d’avoir des flashs, de ressentir certaines choses... un peu comme une réminiscence du petit garçon que j’étais à l’époque, et qui se se cache toujours quelque part en moi... Que penserait-il de l’homme qu’il est devenu? En serait-il fier? Ou bien le regretterait-il, se demandant où l’erreur fut commise? Cela, je ne le sais pas... Mais c’est ce passé qui a fait de moi ce que je suis... Et qui sait, si les choses s’étaient passées différemment... peut-être ne l’aurais-je jamais rencontrée...
Mais je m’éloigne encore du sujet... Je suis né il y a de cela une trentaine d’année, dans un petit village de la nation du feu. Mes parents possédaient une ferme, pas une grande exploitation, une petite ferme... Qui, si elle ne leur aurait jamais permis de devenir « riches », leur offrait néanmoins de quoi survivre assez confortablement...
#Sydjee! Sydjee dépêche toi, tu vas être en retard !#
*Une jeune femme pénètre dans la chambre, et sans le moindre état d’âme en ouvre les rideaux, accablant le pauvre enfant, le laissant subir la lumière matinale du soleil....*
Mmaieuh..... Je veux dormir....
#Tu me dis ça tous les matins. Et comme tous les matins, je te répondrai que tu dois te lever! #
*A ces mots, elle saisit la couverture, le découvrant, le forçant à ouvrir les yeux...*
#Je t’attends en bas dans cinq minutes. Dépêches toi!#
*Puis elle ressort de la pièce, ne laissant aucune trace de son rapide passage, si ce n’est les rayons du soleil qui le frappent maintenant en plein visage... Comme tous les jours, il hésite un moment à désobéir, à rester attendre dans son lit qu’elle vienne le chercher à nouveau... peut-être ne viendrait-elle pas.... Mais, comme toujours, il finit par se lever, enfilant vaille que vaille ses vêtements qui l’attendent sur la chaise, non loin de son lit...*
*Quelques dizaines de minutes plus tard, il était sur la route, son sac sur le dos et le ventre plein. Prêt à affronter une nouvelle journée de cours...
La ferme de ses parents ne se trouvait pas dans le village même, mais à quelques kilomètres du bourg principal, et donc de l’école... distance qu’il lui fallait parcourir matin et soir... D’autres auraient pu s’en lasser, réclamer de leurs familles d’être emmenés à destination... Mais lui, du haut de ses 8 ans, appréciait cette marque de confiance qui lui était ainsi donné... Il était maintenant jugé assez grand par ses parents pour pouvoir accomplir ce trajet seul... Et il ne pouvait s’empêcher d’en éprouver aussi une certaine fierté...*
Avec le recul, je me demande aujourd’hui s‘il ne s‘agissait pas plus d‘inconscience que de confiance... Aussi mature soit-il, en enfant de 8 ans ne peut pas être préparé à affronter tout ce que le monde peut lui opposer... Mais à l‘époque, toutes ces considérations ne me venaient même pas à l‘esprit... j‘étais encore jeune...
*Ses journées se déroulaient ainsi, toutes identiques les unes aux autres... Se lever le matin, puis prendre la route pour rejoindre l’école... suivre les cours pendant la journée, mangeant ce que l’établissement avait à leur offrir... et rentrer le soir, par le même chemin, manger de nouveau, jouer avec sa sœur et faire les devoirs... puis se coucher... Une petite routine bien installée, que rien ne semblait jamais pouvoir perturber.*
*Cela ne devait pourtant pas durer... un matin, alors qu’il s’installait à sa place comme tous les autres jours, son professeur n’entre pas seul dans la salle de classe... un vieil homme à l’aspect étrange, des marques de brûlures sur les mains, le suivait...*
#Professeur : Silence tout le monde!
Je vous présente Maître Galen. Il restera avec nous quelques temps. Je vous demanderai de bien l‘accueillir, et d‘accéder à ses demandes comme s‘il s‘agissait des miennes.
Bien, cela étant dit, aujourd’hui nous allons parler de.....#
*Le cours reprenait son cours, le vieil homme s’asseyant dans un coin de la salle, silencieux...Bientôt tous l’avaient oublié, attentifs à ce que tentait de leur inculquer leur professeur...*
*Sydjee ne faisait pas exception à la règle. Comme ses camarades, il fixait son attention sur les paroles de leur instituteur, ainsi qu'ils avaient tous été habitués à le faire. Même la chaleur qui se faisait de plus en plus oppressante ne parvenait pas à troubler le calme ambiant. Certains commençaient même à ruisseler de sueur, mais pas un n'osait déranger le cours... ni même quitter le tableau du regard... quand soudain...*
#KKYYYYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA!!!#
*Le hurlement s'éleva, strident, choquant... Qui osait troubler ainsi le silence presque rituel qui régnait habituellement? Tous les regards se tournèrent vers la jeune fille responsable... mais celle-ci n'en avait que faire, fixant elle quelque chose sur le sol...
Trop surpris de cette interruption, ses camarades ne pensèrent pas tout de suite à chercher la raison pour laquelle ce cri avait été poussé... Puis ils y en eu qui, surmontant la répulsion qui avait été ancrée en eu de ce genre de situation, baissèrent à leur tour les yeux...*
#AAAAAHHH QU‘EST-CE QUE…#
#LE SOL EST PLEIN DE FLAMMES !!#
*Tous commençaient à s'agiter, grimpant sur les chaises ou les tables pour éviter les flammes, semblant par la même occasion chercher à déterminer qui avait la voix la plus puissante....*
#CAALME!!!!#
*Surmontant les cris, l'ordre retentit dans la salle. Peut-être par habitude, peut-être parce qu'il n'y avait rien d'autre à faire, tous l'écoutèrent...*
#Bande de gamin dégénérés!! Comment les futurs soldats de notre fière nation peuvent-ils ainsi craindre ce qui fait notre force?!#
*Le vieil homme s'est levé, un air dégouté sur le visage. D'un geste brusque, il abaisse sa main, et les flammes disparaissent alors qu'il continue lui à incendier les pauvres élèves....*
#Comment pouvez-vous ne serait-ce que vous considérer comme des fils et filles du feu ?! De mon temps vous auriez déjà été envoyé là où vous le méritez!#
*Le reste de ses paroles se perd dans un flot ininterrompu de marmonnements, alors qu'il quitte la place qu'il occupait depuis le début de la matinée et se dirige vers la sortie... Le professeur, qui était resté muet durant toute la scène, semble soudain sortir de sa torpeur...*
#Professeur :
Ah.. euh...
Le cours est terminé, vous pouvez sortir...#
*Puis il s'en va à la poursuite de Galen, se répandant en excuse et autres flagorneries, laissant les enfants médusés...*
Si nous avions tous été ne serait-ce qu'un peu plus âgés, peut-être aurions-nous pu comprendre ce qui venait de se passer... Pour la grande majorité d'entre nous, voire la totalité, il s'agissait de la première démonstration de maîtrise du feu à laquelle nous assistions... Nous n'étions pas encore capables de mesurer la portée de cet évènement...