par Micky » Mar 31 Juil 2012 21:39
#-Allez au boulot mon gars. Tu vois les caisses là ? Hé bien tu vas aider nos gars et terminer de charger le bateau, plus vite le bateau sera chargé, plus vite on pourra partir !#
*Le regard déjà ailleurs, il se laissa tapoter l'épaule maladroitement en hochant de la tête. Fixé sur le va et viens des hommes entre le quai et les cales, Draven se mit en marche et c'est sous les regards curieux de ceux qui s'approchaient du chargement qu'il saisit a pleines mains son paquetage avant de se baisser et d'un brusque coup de rein le hisser sur son épaule.
Quelques pas en chancelant le temps d'ajuster sa charge et il prit le rythme de l'homme qui le précédait. Draven quitta le quai pour le grincement familier de la passerelle et du pont du bâtiment. Ne pas rester a s'extasier serait difficile, alors il occulta de son esprit les milliers de détails physiques, comportementaux. Les tatouages, les regards, les accents, les imperfections des renforts dans la cale. Tout ce qu'il aurait assimilé d'instinct l'emmenait sans cesse dans ces réflexions tortueuses et salvatrices, certes. Mais peut être pas autant a cet instant qu'un effort physique important après ces quelques jours d'inactivité forcée.
Il ne lui fallut que quelques allez retour pour que les regards se dispersent, et autant pour commencer a mourir de chaud dans sa tunique. Profitant d'être le dernier a descendre en bas, il enleva sa veste et son t-shirt et les rangea dans un coin, s'octroyant l'excuse de revenir fouiner sans paraitre suspect, pour le plaisir.
Quand il sortit, le balai des regards reprit, prévisible.
Draven n'était pas une montagne de muscle, mais son corps délié et sec se dessinait parfaitement dans la lumière. Tout comme les marques de brulures profondes et violentes dans l'intérieur de ses coudes, sur son thorax, qu'on devinait a la naissance de son bas ventre. Celle qu'il avait a l'arrière du crane restait bien heureusement cachée par ses cheveux mi longs. Et même si c'était la dessus qu'il devinait s'attacher l'attention, son tatouage sur le coeur n'était pas si étrange.
Les deux courbes qui s'enroulaient au centre définissaient la nature du crime, le meurtre. Les pictogrammes qu'on distinguaient difficilement de loin racontait les différentes prisons, ou la longueur de la peine.
C'était une carte imposée, un marquage a vie. Une classification qui ne porterait jamais avec honte.
La tête haute, il continua d’œuvrer avec les hommes du bord. Certains avait subversivement hoché la tête, d'autres marquaient leur désaccord franc et entier. Embarquer un ancien prisonnier sans chaine, qui semblait t'il n'avait pas l'air affranchit.
Draven en aurait presque hurlé. "REGARDEZ MOI, Juste.. regardez moi"
Mais il n'y avait plus de douleur a exsuder. Plus pour l'instant, tant que la récompense de cette mission restait la liberté et non une mort oubliée de tous. Une petite heure passa ainsi, dans l'effort, les respirations lourdes et les discussions qui s'étaient tues pour laisser place au cri des mouettes, au claquement des lignes, ailleurs. Une cloche fixée a la coquerie sonna soudain. Le signal semblait entendu si bien que chacun laissa ce qu'il transportait a ses pieds avant de se diriger vers le milieu du pont ou un homme avait disposé une quinzaine de timbales en fer et un baquet remplit d'eau pour se désaltérer.
Apparemment le Capitaine voulait ménager ses hommes. Le départ n'était peut être pas si pressé que le laissait entendre Hartman. Draven profita du répit pour respirer profondément, s'étirer, saisir sa ration et s'accouder au bastingage.
Le bateau encore a quai certes, offrait déjà son flanc bâbord a la mer qui le ballotait tendrement comme on berce un enfant. Le roulis, minime certes, mais perceptible l'envahissait peu a peu. Tout a ses souvenirs, il se laissa immerger par l'eau qu'il aurait aimé rejoindre en sautant du navire pour nager quelques brasses, laver ce corps que les quelques jours en prison a nouveau venait de laisser salit.
Au milieu de tous les bruits du port et de l'équipage qui hormis cette équipe continuait de vivre tranquillement la préparation du périple, il entendit le raclement lourd d'une paire de bottes juste derrière.*
#On rencontre peu de gens de ton espèce par ici, et je parle pas de ton tatouage.#
* Quelques secondes s'écoulèrent paisiblement avant que le jeune Nox ne se retourne lentement pour s'accouder négligemment et offrir a l'autre son regard, un regard semblable au ton de celui qui venait de parler, froid, austère, ampli de ces promesses qu'on susurre du fil d'un couteau par une nuit sans lune. Le calme glacial qui s'emparait de lui se répandit lentement jusqu'au bout de ses doigts, de ses pieds, de ses lèvres qui se mirent a remuer.*
Qu'est ce que ça peut bien vous faire ?
# hahaha #
*Celui qui s’égosillait a présent s'approcha encore en se tapant la bedaine, barbu, massif, les cheveux longs et le corps buriné par les années, chassa de ses yeux les larmes de rires et reprit son sérieux mortel a l'instant même ou il jeta rapidement son bras vers la gorge de Draven. Il referma ses doigts puissant, une poigne terrible, se délectant de lire dans la rougeur qui commençait a envahir le visage du gamin sa victoire psychologique et physique. Un rien le désarma néanmoins, le sourire en coin et ce regard fou qui s'étalait presque triomphant face a lui. Il sentit alors un objet tranchant se poser contre son entrejambe. Baissa les yeux d'effroi et contempla sa propre lame prête a lui couper tout ce qui pouvait représenter sa fierté masculine. Conscient que la partie était perdue, il jura en crachant avant de relâcher cette proie retorse. Il recula de quelques pas sans lâcher ces petits yeux souriants avant de faire volte face, envahie d'une furie vengeresse qu'il devrait s'efforcer de calmer dans l'instant. Au bout de quelques mètres, il s’arrêta néanmoins, un bras sur le mat central, voulait lancer une de ces promesse abscons et terriblement habituelle, chargée de colère et de ressentit. Mais...Au moment même ou il commençait a se retourner. Le son mat d'une lame qui frappe retentit violemment prés de son oreille.
Tournant peu a peu les yeux, il découvrit a deux pouces de sa main son propre poignard enfoncé dans une des rares parties en bois destinées a recevoir toutes les lignes de tensions nécessaires aux diverses porte-drapeaux de la nation.
Il se retourna vers le nouveau qui déjà s'était retourné, l'ignorant royalement.
Six, peut être sept mètres les séparaient... Il caressa son oreille, sa main indemne, sortit sa lame de son logement et disparu vite dans la foule de ceux dont les conversations une fois de plus s'étaient éteintes. Quelques sourires, une vanne graveleuse, mais surtout, un sentiment de profond malaise partagés par les quelques gardes qui s'étaient mêlés aux marins qui eux semblaient être déjà passés a autre chose.
La cloche sonna a nouveau trois fois. Comme pour clore un chapitre, ou plutôt annoncer celui qui suivrait.
A son bastingage, Draven rêvait de poissons, de coraux et d'une houle vive et gracieuse.
Les extrémistes qui se sentaient le droit de punir ceux qui cessaient d'utiliser leur maitrises n'était qu'un détail qui le séparait de ce saut de l'ange.
Il se retourna, serein, souriant presque. Le danger, la rage, la violence, enfouie dans un feu qui couvait a chaque instant derrière ce visage avenant. Il reprit sa place dans la file, heureux de voir que son nouveau meilleur ami s'était mit en queue de colonne pour le surveiller.
Ho, il se doutait que l’événement remonterait a Hartman. Mais lui même devait savoir que c'était une des possibilités qu'ils avaient tous acceptés en le laissant monter sur ce navire. Les camps s'étaient formés, silencieusement. Et derrière les rires viendraient les coups, qu'il était plus décidé, destiné a brisé qu'a recevoir. Fort de ce qu'il était, tranquille, il reprit sa place dans le balai incessant.*